vendredi 23 décembre 2016

Les Contes du Suicidé, d'après Horacio Quiroga






Merci tout d'abord aux éditions Warum et à l'opération Masse Critique de m'avoir permis de découvrir ce livre (et un peu moins merci à la poste pour l’avoir bourré dans ma boite aux lettres... il n'en est pas sorti tout-à-fait indemne).
La nouvelle est un genre tombé en désuétude chez nous. La norme est au roman et le court récit, exercice moins facile qu'il n'en a l'air, rare en francophonie, alors qu'il reste un genre vivace dans d'autres cultures. Par contre, les sud-américains ont conservé un goût pour ce genre littéraire. Les noms de Cortazar et Borgès (qui possédait en plus un sens de la brièveté parfois vertigineux) me viennent directement à l'esprit.
Par contre, je ne connaissais pas l'uruguayen Horacio Quiroga.
Étrange destin que celui de cet homme qui vit la mort rythmer son existence. Son père meurt accidentellement lorsqu’il est enfant. Son beau-père ainsi que sa première femme se suicident. Lui-même abattit accidentellement son meilleur ami lors d'une partie de chasse. Il n'est donc pas étonnant que son oeuvre, considérée comme fondatrice du réalisme magique, soit marquée par l'amour et la mort. L'un de ses livres les plus célèbres s'intitule d'ailleurs Contes d'amour, de folie et de mort.
Trois nouvelles extraites de ce recueil  ont été adaptées en bande dessinée par les argentins Lautaro Ortiz, rédacteur en chef de la revue de BD Fierro, et Lucas Nine, fils du dessinateur Carlos Nine (mais qui vaut bien plus que de n'être que le fils de...).
Trois récits baroques.
Trois récits d'amour et de mort.
Alicia étouffe dans un mariage morne. Elle espérait une union romantique et passionnée. Elle doit se contenter d'un mari froid et souvent absent. Est-ce pour cela qu'elle commence à s'étioler ?

Deux amants maudits se suicident et espèrent pouvoir enfin vivre leur amour dans la mort.
Un savant tente de retrouver l’image de celle qu’il a aimé.
Edgard Allan Poe n'est pas loin. On retrouve cette ambiance baroque, cette poésie morbide...

Optant pour un format très allongé, les personnages prennent l'allure de spectres qui déambulent dans un univers étriqué. Lucas Nine opte pour une approche surréaliste qui n'est pas sans rappeler le travail de Frédéric Bézian sur La Danse des morts (mais en couleur) ou celui d'Alberto Breccia, le génial auteur argentin qui a livré quelques unes des plus belles planches adaptées de l'univers de EA Poe. Comme le maître argentin, il mélange les techniques et s’appuye sur des photos et collages, essentiellement dans le dernier récit de ce recueil.
Le coeur  révélateur, de Breccia: une merveille
Les éditions Warum continue de proposer de beaux livres, tant pour l'objet que pour la qualité des oeuvres. Ce recueil m'a séduit. Il s'en dégage une beauté particulière et vénéneuse. On le referme en ayant furieusement envie de découvrir Horacio Quiroga.
Une très belle surprise.